Bon… vous avez eu une première rencontre avec votre orthopédiste. Vous avez signé un formulaire de consentement précisant que vous comprenez tous les risques et conséquences associés à une arthroplastie totale de la hanche ou du genou. Et maintenant, vous ne pensez qu’à la chirurgie, incontournable réalité, en vous demandant : « Mais dans quoi ai-je été me fourrer? »
Oui, la douleur est intense et constante. Mais, au moins, vous savez à quoi vous en tenir de ce côté. Même si vous aimeriez vraiment y mettre fin, vous vous engagez dans une voie des plus obscures. Et ça vous fait peur. Est-ce que les résultats en vaudront vraiment la peine?
À votre première rencontre, l’orthopédiste a probablement insisté sur certains faits auxquels vous serez bientôt confronté : analyses en laboratoire, exercices, physiothérapie, préparation à la chirurgie, blablabla, rétablissement, petits changements au mode de vie, blablabla, exercices et blablabla. Comme la majorité des gens soumis à un stress émotionnel, la plupart des détails vous sont entrés par une oreille et sortis par l’autre!
Ne vous en faites pas. Vous aurez une seconde occasion de poser toutes vos questions relatives à la chirurgie en clinique préopératoire. Assurez-vous toutefois que l’assistant administratif de l’orthopédiste ou vous-même prenez un rendez-vous pour cette très importante séance d’information d’une journée, idéalement de quatre à six semaines avant la chirurgie. En prenant ainsi rendez-vous, vous faites le premier pas sur le chemin de la guérison, qui vous permettra de retrouver fonction et mobilité. Félicitations! Vous respirez déjà mieux.
Puisque vous aurez probablement du temps libre avant de vous présenter à la clinique, nous vous proposons un aperçu du chemin à parcourir afin que vous puissiez vous préparer à cette expérience et savoir un peu à quoi vous attendre. En plus de connaître, en théorie, le déroulement de votre chirurgie, il y a de nombreuses questions pratiques dont il faut tenir compte, surtout si vous habitez ou travaillez seul.
La majorité des hôpitaux canadiens ont adopté un « continuum de soins » pour les interventions orthopédiques, c’est-à-dire une méthode de traitement qui, selon les besoins du malade, le met sur la bonne « voie », de sorte à ce qu’il reçoive les meilleurs soins possible. La majorité des malades emprunteront la voie rapide, menant directement à la chirurgie après un mois environ. D’autres, en revanche, devront faire quelques détours en raison de leur état de santé (hypertension, diabète ou fibromyalgie, par exemple).
AVANT LA CHIRURGIE : la clinique préopératoire
La clinique préopératoire est le point de départ de toute démarche vous y subirez un examen médical poussé et remplirez un questionnaire détaillé sur vos antécédents médicaux. Vous pourrez alors en profiter pour signaler tout autre problème de santé de même que tout médicament ou remède galénique que vous prenez régulièrement. Si votre état nécessite que vous soyez suivi par un spécialiste, on prendra un rendez-vous de sorte à étudier votre cas et à effectuer des examens qui permettront à l’équipe de soins de mieux adapter la chirurgie à vos besoins.
On effectuera aussi des analyses de sang afin d’établir votre groupe sanguin et de détecter toute infection devant être traitée avant la chirurgie. On analysera peut-être votre urine, là aussi pour déceler de possibles infections. Donc, s’il y a des problèmes, on aura amplement le temps avant la chirurgie pour y remédier. On fera également des radiographies, de sorte à ce que votre orthopédiste ait à sa disposition une image à jour de la région opérée. Si, pour une raison ou une autre, vous n’avez pas encore signé de formulaire de consentement, vous pourrez le faire à la clinique préopératoire.
On tient cette clinique si tôt avant l’opération pour vous donner l’occasion, entre autres, de donner du sang qui sera mis de côté en prévision de votre chirurgie. Si nécessaire, vous pouvez donner du sang toutes les semaines pendant les quatre à six semaines entre la clinique préopératoire et la chirurgie. La quantité de sang nécessaire varie selon le type de procédure (arthroplastie du genou par rapport à arthroplastie de la hanche, par exemple) et la durée de l’intervention. Une reprise chirurgicale demande généralement plus de temps, donc une transfusion plus importante.
La clinique préopératoire ne sert pas exclusivement à la prise de rendez-vous et aux examens. Elle comprend aussi un volet d’apprentissage. Les directives sont généralement revues par un physiothérapeute, mais vous rencontrerez probablement aussi un anesthésiste, une infirmière, un ergothérapeute et un travailleur social. Ensemble, ces professionnels de la santé essayeront de brosser un tableau général de ce qui vous attend le jour de la chirurgie et après, et de répondre à vos questions.
Peu importe le type de chirurgie que vous devez subir, le physiothérapeute ou son assistant joueront un rôle de premier plan dans votre quotidien, puisqu’ils se spécialisent dans la réadaptation postopératoire. Dans les faits, la réadaptation commence même avant la chirurgie. On vous incitera à commencer sur-le-champ une série d’exercices, de trois à quatre fois par jour, spécialement conçue pour renforcer l’articulation affectée et en conserver l’amplitude. Ces recommandations ne sont pas simplement attribuables à l’intérêt marqué du physiothérapeute pour la bonne forme physique : les exercices quotidiens avant la chirurgie ont bel et bien une incidence positive sur votre capacité à récupérer votre force et votre tonus musculaires après l’intervention.
En faisant ces exercices régulièrement, vous améliorerez aussi votre circulation sanguine, ce qui réduit les risques de formation de caillots dans votre jambe (une complication appelée thrombose veineuse profonde). Après le choc de la chirurgie, les risques de caillots sont plus grands dans les veines des membres inférieurs et du bassin, surtout en raison de la pression locale que l’immobilité, c’est-à-dire une période prolongée passée au lit, exerce sur les veines. Il s’agit d’une complication grave, puisque le caillot peut facilement se détacher de la paroi de la veine et aller se loger dans les poumons ou dans une artère pulmonaire, la principale source de sang pour les poumons. S’il s’agit d’un petit caillot, il peut entraîner des douleurs à la poitrine et de l’essoufflement. Toutefois, si le caillot est assez gros pour obstruer complètement l’artère, il peut être mortel. Le personnel hospitalier et de réadaptation est formé pour reconnaître les symptômes d’une thrombose veineuse profonde (douleur locale et enflure du mollet ou de la jambe en entier) et les traiter sur-le-champ (anticoagulants et, parfois, intervention pour retirer le caillot). Dans certains hôpitaux, on prescrit de l’héparine et de la warfarine à des fins préventives, surtout si le malade a déjà eu des problèmes liés à la coagulation.
Dès que vous aurez retrouvé la sensation dans vos membres inférieurs, une fois les effets de l’anesthésie estompés, on vous incitera à faire un exercice pour les pieds et les chevilles afin de réduire l’enflure et de favoriser la circulation sanguine. Il s’agit d’un exercice simple que l’on fait couché : pointez les orteils et ramenez-les vers vous. Faites régulièrement ce mouvement pendant votre période de rétablissement, surtout les premiers jours suivant la chirurgie. Grâce à cet exercice et à tous les autres prévus dans votre programme de réadaptation, vous aurez beaucoup moins mal, l’enflure sera réduite et vous retrouverez votre mobilité beaucoup plus rapidement. Plus vite vous récupérerez, plus faibles seront les risques de thrombose veineuse profonde.
Ensuite, vous rencontrerez probablement un anesthésiste, qui vous expliquera ce qui se passe quand on subit une anesthésie locale ou générale. Dans les deux cas, on ne ressent aucune douleur pendant la chirurgie, ce qui est le but. La durée des effets de l’anesthésie générale est variable (au moins une journée) une certaine désorientation et un manque d’énergie peuvent occasionnellement être accompagnés de maux de tête, de nausées ou de constipation. Si votre état de santé général est bon, vous pouvez opter pour une anesthésie locale, qui engendre moins de symptômes postopératoires apparentés à la « gueule de bois ». Toutefois, cela signifie que vous serez éveillé pendant la chirurgie et que votre vue sera obstruée par un rideau. Il n’est donc pas surprenant que la majorité des gens optent pour l’anesthésie générale.
Une infirmière discutera du processus le jour de la chirurgie et des « règles à suivre » sur le chemin de la guérison. On ne va pas à l’hôpital comme au spa. Néanmoins, vous devrez apporter quelques effets personnels avec vous. Votre séjour durera de trois à cinq jours. Vous aurez donc besoin de pantoufles, d’un peignoir, de vêtements de nuit et d’articles de toilette (brosse à dents et dentifrice, rince-bouche, savon, lotion, rasoir, peigne, désodorisant, produits d’hygiène féminine, etc.).
Vous devriez également apporter tous les médicaments que vous devrez prendre pendant votre séjour. Laissez-les dans leur emballage d’origine afin que les infirmières puissent les identifier correctement. Ne prenez que les médicaments ou remèdes galéniques permis, car d’autres produits pourraient interagir avec les anesthésiques et analgésiques qu’on vous aura donnés à l’hôpital. Dans le doute, demandez ce que vous devez faire au personnel infirmier. On vous demandera aussi de ne pas manger ni boire dès minuit la veille de la chirurgie. En effet, tout aliment ou liquide présent dans la partie supérieure du tractus alimentaire pourrait interagir avec les anesthésiques ou provoquer un vomissement et, possiblement, une suffocation pendant l’opération.
Les hôpitaux sont de véritables ruches : le personnel d’entretien, le personnel infirmier et de nombreux visiteurs se déplacent partout dans ces édifices. Il est donc recommandé de ne pas apporter d’objet de valeur pour éviter tout risque de perte ou de vol pendant votre séjour. Laissez votre argent, vos bijoux, votre lecteur CD et tout autre objet de valeur à la maison.
On vous donnera du savon désinfectant, généralement sous forme de tube. Vous devrez vous en servir pour nettoyer l’articulation affectée en prenant votre douche la veille ou le jour même de la chirurgie. Il se peut que l’infirmière vous explique le fonctionnement d’une pompe à analgésique, qui sert à contrôler la douleur postopératoire.
Un ergothérapeute abordera avec vous certains des changements à venir dans votre mode de vie. Par exemple, pendant les semaines suivant l’opération, vous devrez faire attention à la façon dont vous marchez et faites vos tâches quotidiennes, puisque votre corps sera en guérison et devra s’adapter à votre prothèse. Supposons que vous subissez une arthroplastie de la hanche. Afin d’éviter tout risque de luxation pendant la période de rétablissement, vous devrez éviter de croiser les jambes et garder les genoux plus bas que les hanches quand vous êtes assis. L’ergothérapeute vous remettra un coussin en coin pratique qui, une fois mis sur votre chaise, soulèvera automatiquement vos hanches.
Avant de vous rendre à l’hôpital, il est important de préparer votre domicile pour votre retour. Faites le ménage avant de partir ou demandez à quelqu’un de le faire pour vous. Préparez-vous des repas à l’avance et mettez-les au congélateur ou faites le plein de repas surgelés. Il sera peut-être trop difficile pour vous de vous pencher pour mettre quelque chose au four pendant les premiers jours. Il serait peut-être plus sage d’opter pour des plats que l’on peut réchauffer au four à micro-ondes.
Chaque domicile est aménagé de façon unique. L’ergothérapeute peut vous aider à dresser la liste de vos tâches quotidiennes et à trouver des façons de les rendre plus faciles pour les semaines suivant votre intervention. Par exemple, qui promènera le chien? Les articles sont-ils trop hauts, trop bas et difficiles à atteindre? Il est préférable de ranger vos articles à un niveau correspondant à l’espace entre votre taille et vos épaules. Vous devrez vous abstenir de soulever des paniers de lessive et des sacs d’ordures pendant plusieurs semaines. Assurez-vous de retirer tous les tapis et fils qui pourraient se prendre dans vos béquilles ou votre marchette. Est-ce que votre escalier comprend une rampe supportant votre poids? Enfin, vous voyez un peu de quoi il s’agit.
Finalement, le travailleur social pourra vous aider, dans le cadre de la clinique préopératoire, à remédier à d’autres questions d’ordre pratique relativement à votre convalescence. Vous aurez peut-être besoin de l’aide de quelqu’un à la maison pour vous aider à effectuer vos tâches quotidiennes, comme prendre votre bain, préparer les repas et faire la lessive. Si vous vivez seul ou que personne parmi vos proches ne peut s’occuper de vous, le travailleur social peut veiller à ce qu’un préposé aux soins à domicile vous aide pendant votre convalescence. Si vous êtes sur le marché du travail, vous devrez prévoir un congé assez long, selon le type de travail que vous faites. Vous pourriez aussi demander à être assigné à des tâches moins astreignantes physiquement. Le travailleur social connaît les différentes normes du travail applicables à votre situation. Il pourra donc vous aider à formuler votre demande. Si vous travaillez en milieu syndiqué, renseignez-vous auprès de votre représentant syndical.